Nous longeons la majestueuse vallée d'Ambalavao sur une très belle route qui serpente le flanc des collines. Nous ne roulons pas vite, pour mieux admirer, mieux respirer, mieux nous imprégner. Plus nous nous enfonçons dans le sud, plus l'atmosphère s'attiédit. La paysage est magnifique. Impossible de résister à la tentation de nous arrêter pour les photos souvenirs...
A Ambalavao, on apprend que la piste pour aller au camp Catta est pourrie de chez pourrie, depuis le passage du cyclone : même avec notre 4x4 ça passerait limite, avec l'express, c'est inimaginable ! Après mûres réflexions, nous changeons de plan et pénètrons le domaine du massif de l'Andringitra en direction du gîte de l'Angap : « c'est mieux que vers le camp catta, mais c'est quand même chaud ! » nous prévient-on !
Tout s'en va derrière nous, le bitume, la petite ville, les voitures, ptits hotels ptis restaus, le marché, tout s'efface dans la fumée de l'échappement, dans la poussière rouge soulevée au passage de nos roues. On se dirige vers nulle part, sur les veines rouges de la terre, entre monts et vaux de plaines, de rizières, de broussailles, les courbes et les pics de l'impressionnant massif gris et luisant au soleil, et toujours ces jolis nuages sur fond bleu en arrière plan. On traverse quelques rares villages de brousse, à l'entrée desquels des enfants nous attendent pour les « Saaaliiiit vazahaaaa ! ». Des cochons couinent autour d'eux, des zébus ruminent dans les cours imaginaires. Tout est rougi par la terre, tout est brillant au soleil. Le temps semble s'être arrêté ici. Tout au long de la route, des gens apparaissent et disparaissent, bras levés, « salamééé ! » « ahoanééé ! » « tsarééé ! ». Les yeux sourient aux réponses de xav, s'étonnent au malgache de Titine, et s'écarquillent à la vue de Meva. La piste est très mauvaise, très caillouteuse par endroit, compacte de latérite par ailleurs, et des kilomètres de passages de boues épaisses, gluantes, glissantes avec de dangereux profonds sillons tracés par le passage des charettes ou d'autres voitures, ainsi que d'énormes trous très mal placés... nous devons enclencher la vitesse spéciale 4x4, et nous inquiétons sérieusement pour la petite Express. Terrano avance en éclaireur. Il prend de sacrés coups, mais ça passe sans trop trop de complications. Il faut nous arrêter très souvent, analyser l'état du terrain, faire des choix. L'Express peine, se fait emporter légèrement à gauche légèrement à droite, le moteur ronfle, les roues patinent par moment, le ventre prend des coups, encore plus forts que la terrano, ça « mikasoka » comme on dit ici, mais ça passe toujours ! Pause déjeuner face à un paysage grandiose pour reprendre nos esprits. Des collines peau poussière d'un rouge vif, velouté de broussailles vertes, parfois jaunies par le brulant soleil. Des étages de rizières qui grimpent jusque là où il n'y a plus que pierre, vatolampy, du granit d'où s'écoule vivement un filet d'eau qui semble venir tout droit du ciel profondément bleu.
Nous mettons plus de trois heures pour arriver à une dizaine de kilomètres du bout du bout. Un musée s'est implanté là, un musée très bien fait sur la région, son peuple, sa culture, un musée qui nous a plus qu'étonné tant dans son implatation, au milieu de nulle part, que dans sa présentation et la richesse de son contenu ! Il y a même des « lunettes » d'observations, quelques brochures et toutes les infos qu'il est bon de savoir sur le coin (sentiers de rando, tarifs, conseils...) ! Vu les ouvertures culturelles à Mada, notamment concernant les musées, celui-ci mérite vraiment plus que des encouragements ! Si peu de gens s'arrêtent là, regrette la guide gardienne des lieux ! Elle nous informe avant de reprendre notre route que le dernier pont quelques kilomètres avant le gîte est sur le point de s'écrouler, et que le 4x4 de l'Angap a préféré rebrousser chemin la veille, et n'est donc pas arrivé au bout ! Sic !!!
Arrivés au dit pont, tout le monde descend. Il est effectivement très mal en point. On analyse, marche, va, vient, saute, s'allonge, scrute, commente. Des gens surgissent des broussailles, de la piste rouge, nous observent, puis comme nous, marchent, vont, viennent, sautent, s'allongent, scrutent, commentent aussi ! Meva joue dans la poussière rouge avec de nouveaux petits copains. Titine discute avec des femmes sans âge, des mères de tout petits bouts suspendus à leur dos. Les hommes sortent des cordes pour renforcer le pont, et pour accrocher la première voiture. Cette fois, c'est l'express, plus légère, qui va en éclaireuse. On se met tous de l'autre côté, là où la terrano attend son tour, et on croise les doigts. Silence. Le vent souffle. Il fait chaud. Les gens murmurent. Quelqu'un nous rappelle encore que le 4x4 de l'angap a fait demi tour hier ! On hésite un peu. Moteur. Les roues glissent. Les planches claquent. Ca tangue un peu. Ca dure quelques minutes à peine, quelques secondes même peut-être. Et cris de guerre éclat de rire victoire ! C'est passééééé, yaouuuu !!!!!
Ce n'est qu'en presque fin d'après midi que nous atteignons le gîte. Ca nous laisse tout juste le temps de mijoter notre trip avec un guide, pour commencer une nouvelle aventure dès le lendemain. On a du retard par rapport au programme prévu, et vue l'état de la piste, nous décidons d'annuler l'aller retour à Ambalavao pour le marché au zébu du mercredi ! Dommage, mais bon, c'est pour mieux profiter de l'Andringitra ! Au programme, randonnées avec trois quatre jours de bivouacs dans le parc !